Un géant dans les Flandres

Il pensait que c’était impossible alors il l’a fait… Le 26 septembre 2021, Julian Alaphilippe remporte pour la deuxième année consécutive le championnat du monde de cyclisme sur route. Pourtant rien n’était gagné à l’avance.

Tom Lerat

2/3/20223 min read

La malédiction du maillot arc-en-ciel

« Porter une pancarte dans le dos », si on devait résumer le statut de Julian Alaphilippe cette année, ce serait sûrement cette expression qu’on retiendrait. En effet, dès les semaines suivant son sacre à Monza en 2020, le coureur français est victime de ce qu’on appelle dans le milieu de la petite reine : la malédiction du maillot arc-en-ciel (couleur du maillot du champion du monde n.d.l.r). Le décor : les rues de Liège sous la pluie wallonne. Alors qu’il se voyait déjà remporter le Liège-Bastogne-Liège, notre champion du monde est rattrapé à 20 mètres de la ligne par le Slovène Primoz Roglic (un véritable déchirement). 

Porter cette tunique ce n’est pas une mince affaire et le début de saison 2021 le montre bien : souvent battu sur le fil du rasoir, Alaphilippe est LA cible à abattre sur les classiques, 2e sur les Strade Bianche, 2e sur le Liège-Bastogne-Liège (édition 2021) où il est encore une fois battu par un slovène Tadej Pogacar. Une lumière au tableau en ce début de saison frustrant : une troisième victoire sur la Flèche Wallonne et son terrible Mur d’Huy. La malédiction qui touche les champions du monde en titre serait-elle en passe de se réaliser pour Julian ? 

Le panache, la recette du succès

Sur le Tour 2021, une chose est claire, le français est loin d’être le grand favori pourtant, dès la première étape son légendaire panache fait vibrer la France entière, malgré le retour du peloton lancé à vive allure dans la campagne bretonne, notre Cyrano du vélo parvient à remporter à Landernau en solitaire l’étape d’ouverture ainsi que le légendaire maillot jaune. Même s’il le perd le jour suivant, la performance est à souligner car dans un Tour émaillé de soupçons de dopage et plié dès la 8e Etape par les Slovènes (encore eux oui !). Tel le héros d’Edmond Rostand, Julian est le sel d’un Tour fade et sans saveurs. Même s’il ne reportera plus d’étapes sur cette édition, ses attaques à la hussardes seront remarquées par le public et méritera largement sur les Champs-Élysées le titre de « Super-combatif ». 

Comme une ode à l’ancien temps, Julian Alaphilippe sait faire vibrer le cœur du public à l’image d’un Merckx, d’un Hinault ou d’un Poulidor en leurs temps. Le français apporte un vent de fraîcheur dans un cyclisme qu’on dit souvent mou et inintéressant, sachant prendre des risques et restant loin des logiques des grosses écuries passant leur temps à bloquer le peloton. Sera-t-il le prochain français en jaune sur les Champs ? Peut-être pas, mais une chose est sûre, il a tout le potentiel pour réconcilier le public avec ce sport. 

Une fois de plus, la Belgique mange son seum

Jeune papa, le français va refuser de participer aux Jeux Olympiques de Tokyo. Mais ce n’est pas pour autant qu’il n’a pas une idée derrière la tête : les championnats du monde 2021. Et cette année, ils se déroulent dans le pays du vélo (n’en déplaise à Strasbourg) ; les Flandres. En Belgique, c’est la folie, à défaut de nous avoir battus lors de l’Euro, les sportifs belges s’y voient déjà : ramener le maillot arc-en-ciel à la maison. Toute la presse les annonce ultra favoris et le plat pays est uni derrière son champion Wout Van Aert. Il est vrai que le belge est l’auteur de belles performances depuis le début de la saison et toute la Gaule est persuadée de le voir gagner au pays de la BD. Toute la Gaule ? Non, une équipe d’irréductibles menée par leur entraîneur Thomas Voeckler est prête à tout pour conserver le mythique maillot. 

Dès le début de la course, les belges sont ultra dominateurs, le travail d’équipe semble payer. Mais ce n’était sans compter sur le légendaire panache de notre français à 17 kilomètres de l’arrivée et après avoir dynamité le peloton avec l’équipe de France, qu’il décide d’attaquer en solitaire. À la fin de l’envoi, il touche, le français fait mouche dans les rues de Louvain et laisse ses adversaires sans aucun mot en bouche. Seul sur la ligne d'arrivée, il triomphe. Une fois de plus, l’audace aura eu raison face au contrôle du peloton. Prouvant une fois encore que le cyclisme n’est pas un sport si prévisible que cela. 

De son côté, le français remporte pour la deuxième fois consécutive cette tunique arc-en-ciel qui lui va si bien. Premier français à réaliser cet exploit, il grave son nom du bout de son fleuret dans les annales du vélo. Ce 26 septembre 2021, dans les Flandres, Julian n’a pas été un très grand, c’était tout simplement un géant.